En mars 2007, Jacques visitait un couple d’amis suisses vivant au Paraguay, Eduardo et Irma
Nüesch. Ensemble, ils roulaient sur la Trans-Chaco en direction du nord-ouest, dans l’intention de visiter une grande ferme à 300 km d’Asuncion…. Cette Trans-Chaco est la seule route goudronnée qui va d’Asuncion, la capitale, vers la frontière avec la Bolivie, un trajet d’environ 600 kilomètres.
Au kilomètre 153 depuis Asuncion, la voiture tomba en panne. Au loin, ils apercevaient des toits de tôle en bordure de la route. Les trois touristes européens s’y rendirent à pied pour chercher de l’aide et un téléphone. Là, surprise, ils découvrirent une école logée dans de nombreux bâtiments en bois de palmier, avec des toits de tôle servant à récolter la pluie dans de grandes citernes. Et une population de quelque 600 écoliers et écolières, plus une cinquantaine d’éducateurs et d’employés. Ils venaient d’arriver à l’Escuela Pa’i Puku, à l’époque l’unique école au milieu du Chaco Boréal, un territoire grand comme les deux tiers de la Suisse et peuplé de 15'000 habitants seulement. Pendant les deux jours d’attente pour voir arriver une dépanneuse, ils furent hébergés par les responsables et eurent le temps de ces visiter les lieux et de mieux comprendre l’importance de cette École pour l’éducation de enfants d’employés agricoles, nés dans les fermes isolées de cette vaste plaine, et qui résident à l’École près de 10 mois par année.
Ils eurent une discussion avec la directrice d’alors, Mme Cristina Geersens, une des
fondatrices de l’École en 1965, avec le Père Pedro Shaw et trois autres personnes d’origine
flamande, qui avaient été envoyés dans cette région par une organisation belge.

La découverte de l’École continue le lendemain matin, et quelle ne fut pas la surprise de Jacques, au moment du petit-déjeuner, lorsqu’il boit le cocido (cette boisson typique paraguayenne), ce qu’il décrira plus tard comme de l’eau sale sucrée. Un petit-déjeuner accompagné de pain pour rassasier plus de 500 estomacs affamés. Mais qu’est-ce que ce cocido ? Il s’agit simplement de maté cuit, mélangé à de l’eau, du lait ainsi que beaucoup de sucre pour diminuer l’amertume du maté.
Au fur et à mesure de la journée, Jacques découvre que les enfants manquent de nourriture, mais surtout de qualité. L’eau bue : de l’eau de pluie, conservée dans des citernes et servie aux enfants sans traitement pour la purifier. La nourriture n’est pas suffisante pour le nombre d’enfants logés au Centre ; les bâtiments sont des constructions toutes simples en bois, non- chauffées en hiver. Les dortoirs des enfants ne sont pas bien équipés.
Jacques rentre en Suisse très touché par ce qu’il a vécu. Il réussit à lever des fonds auprès de différents donateurs en Suisse. Et c’est ainsi que cinq membres fondateurs créent, en mai 2009 en Valais, l’Association Suisse-Pa’i Puku (ASPP). Son Comité est composé aujourd’hui de Jacques Bille, président, Michel Clavien, vice-président et des autres membres : Eduardo Nüesch, Irma Nüesch Lahaye, Cinzia Maschietto, Myriam Studer, Michel Andrey, Nathalie Hugon, Cloé Vianin et, tout récemment, Werner Gerber, notre actuel consultant au Paraguay. Sous la conduite de Jacques, l’Association peut de la sorte apporter rapidement une aide matérielle au Centre, fort appréciée.
C’est ainsi que différents projets sont promptement réalisés, notamment le financement d’un troupeau initial de 17 vaches laitières et d’un taureau, de parcs clôturés pour garder ce bétail, d’un système de potabilisation de l’eau aux ultraviolets, d’une laiterie/fromagerie avec son équipement, d’un grand réservoir d’eau. Sans oublier, naturellement, la mise en place d’un programme de parrainages, depuis la Suisse, pour des enfants les plus défavorisés. Leur réalisation a largement bénéficié, notamment, des compétences et de l’engagement d’Eduardo Nüesch, qui habitait au Paraguay ; il sera le consultant de l’ASPP sur place jusqu’en 2010. Dès lors, l’Association a pu trouver son remplaçant en la personne de Werner Gerber, ingénieur agronome jurassien, ancien spécialiste de la Coopération technique suisse, installé au Paraguay depuis plus de 40 ans.
Qui aurait pu dire qu’une panne de voiture et que de l’eau sale sucrée allaient chambouler toute la vie de Jacques et des autres ?